La Mustang I, c'est presque 3 millions d'exemplaires vendus et un succès qui ne s'est pas fait désirer. Le 17 avril 1964, le nouveau petit coupé Ford fait des émules. Le 18, elle a déjà écrasé sa concurrente du groupe Chrysler (la Plymouth Barracuda) avec 22 000 heureux propriétaires !
Côté carrosserie, la toute première Mustang fut basée sur la Ford Falcon. Dès les prémices et au fil des années, elle s'est démarquée de sa base "format familial" en affirmant son caractère et en proposant deux autres types de lignes en plus du coupé standard. Se retrouvèrent alors une version cabriolet, ainsi que celle qui a le plus forgé son identité moderne : la version Fastback et sa longue ligne de toit plongeante qui lui donnait cette allure si dynamique.
À l'intérieur, la pony car de Ford en a sous le sabot. À une époque où un café en terrasse coûtait plus cher qu'un gallon de carburant (on exagère à peine), la Mustang fit la part belle à la sacrosainte cylindrée avec des 6 en ligne pouvant atteindre 4,1L et 101ch dès l'entrée de gamme. Pas mal pour une voiture low cost ! Mais pourquoi se contenter d'un six cylindres quand on peut s'offrir la Mustang dans toute sa splendeur avec un moteur V8 devenu aujourd'hui presque incontournable ? Au top de sa forme, l’écurie Mustang de première génération pouvait atteindre les 375ch, avec des moteurs V8 allant jusqu’à 7L de cylindrée !
En 10 ans de carrière, la Mustang I eut tout le loisir de poser les bases formelles de sa dynastie. C’est notamment avec la génération 1967 que la petite pony car de Ford commença à monter au galop et à s’affirmer face à de féroces concurrentes telles que la Chevrolet Camaro. Sa ligne devint alors plus musclée, plus sportive aussi. Son incontournable capot plongeant sur la calandre se fit plus saillant, et sa largeur fut revue à la hausse pour permettre de lui intégrer plus facilement son désormais célèbre V8 6,4L de 320cv. À la fin des années 60, la Mustang était entrée dans une course qu’elle avait elle-même provoquée, et dans laquelle elle ne comptait pas se laisser distancer !
Au crépuscule de sa première mouture, la Mustang amorça une rupture avec son ADN originel. La pony car compacte prit le large pour implanter sa version fastback (renommée Sportroof ou “toit sport”) sur le marché des muscle cars. Toujours plus massive, agressive et élancée, la Mustang vit de nombreux éléments de sa carrosserie muter comme sa calandre, ses phares ou ses ailes.
L’évolution se fit encore plus flagrante dès la génération 71. Dévouée aux moteurs “big blocks” et aux châssis massifs, la Mustang perd toute notion de compacité et cet aspect trapu qui a fait sa renommée. Entre la concurrence grandissante et ces évolutions esthétiques parfois jugées trop en décalage avec l’esprit initial, la Mustang vit ses ventes diminuer en passant d’environ 500 000 exemplaires pour la version 69-70, contre 400 000 exemplaires les trois années qui suivirent. Une pente glissante où le cheval allait encore commettre quelques faux pas lors des générations suivantes.
1974 ne fut décidément pas une bonne année pour les bolides assoiffés de sans-plomb. Au lendemain du premier choc pétrolier, passer à la pompe n’est plus une partie de plaisir et la muscle car de grosse cylindrée qu’est devenue la Mustang vit son intérêt écorné. Il était alors grand temps pour Ford de retourner sa selle pour s’orienter vers des motorisations plus sages, telles que des moteurs 4 cylindres en ligne de 2,3L seulement ou de plus timides V8 de 4,9L. Un véritable défi pour la Mustang qui dut préserver ses lettres de noblesse en travaillant sur l’efficience de ses moteurs, ainsi que sur sa ligne qui devait alors s’orienter vers d’autres marchés.
C’est ainsi que la mythique muscle car américaine devint plus européenne que jamais. Pour séduire sans tout miser sur la puissance, Lee Lacocca opta pour des bases de Ford Pinto et de Ford Capri allemandes afin de concevoir une Mustang II plus fiable, plus compacte, dotée d’une meilleure tenue de route et plus luxueuse. Un petit coupé redevenu plus mesuré, et plus distingué !
Bien que la Mustang II s’avéra être un retour aux sources vers le modèle 1964, et même si elle améliora sa copie tout en renouant avec ses meilleurs attributs esthétiques, le public manquait à l’appel.
On compte aujourd’hui 1,1 million de Mustang II vendues, et seulement 18 000 le premier mois. Si ces chiffres demeurent honorables, ils traduisent deux choses. D’une part, la Mustang a pu survivre au choc pétrolier en adaptant son prix, sa motorisation et son image. D’autre part, face à sa propre légende bâtie lors de la première génération, il devenait difficile de se réinventer sans compromis. Cette volte-face réussie grâce à son adaptation au contexte économique fonctionna donc globalement une fois, mais pas deux…