D'abord simple édition spéciale survoltée de la petite pony-car de Pontiac, la Firebird édition "TransAm" n'eut besoin que d'une génération pour devenir un modèle à part entière sur les routes et dans le cœur des amateurs de grosses cylindrées. Pouvait-on faire plus 70's que ce coupé hurlant griffé General Motors ? Probablement pas. La Firebird vit le jour en 1967 suite à la mise au rebut du concept de supercar Banshee, et à la nouvelle envie de Pontiac de prendre sa part du gâteau sur le marché des muscle-cars. Pour y parvenir, et pour concurrencer l'indétrônable Ford Mustang, la Firebird emprunta le châssis et l'audace de la Chevrolet Camaro afin de briller par des performances éblouissantes dont la version Trans Am resta la plus belle représentante.
Avec ou sans hood scoop, avec six cylindres en ligne ou un gargouillant V8, la Pontiac Trans Am avait tout pour faire rougir les lignes blanches et marquer les esprits. Et ce fut le cas ! En 1977, la seconde génération de Trans Am creva l'écran entre les mains de Burt Reynolds dans Cours après-mois Shérif et porta ses ventes à 1 400 000 exemplaires. Malheureusement pour la génération suivante de 1982, tout fut à refaire.
En 1982, après deux crises pétrolières, les temps sont rudes pour les muscle-cars. Les soupapes sont en berne et boire du sans plomb comme du petit lait n'est plus une option pour affirmer son caractère. La Trans Am de Pontiac dut alors repenser sa copie en misant sur l'aérodynamisme, la technologie et la légèreté pour rester vive et attractive en rationnant sa consommation de carburant. C'est ainsi que vint au monde une nouvelle Trans Am plus basse, plus étirée, dotée de phares escamotables pour les beaux yeux de la soufflerie et d'un ordinateur de bord plus pointu.
D'ailleurs, pour profiter de la puissance de son moteur Corvette V8 Cross-Fire 5L de 175ch, il fallut dire adieu au carburateur et laisser sa boîte auto à trois rapports ainsi que ses injecteurs faire le boulot. L'heure était à l'efficience ! Et avec un régime d'environ 230kg, un design aussi félin que précurseur en matière d'aérodynamisme et des performances qui restèrent dignes de son nom, la Trans Am 1982 de troisième génération réussit son pari. Il ne lui restait plus qu'à se refaire une réputation pour rester sur le devant de la scène ! Finalement, son salut lui vint non pas du grand, mais bien du petit écran.
K2000 (ou Knight Rider dans le pays de la liberté), c'est la preuve en 90 épisodes qu'une rangée de diodes peuvent être plus expressives que David Hasselhoff. Dans cette série américaine signée Glen Larson un peu "Z", mais résolument culte, l'agent présumé mort Michael "Knight" Long se voit offrir un nouveau visage et une voiture aussi classe que loquace par la mystérieuse Fondation pour la Loi Et le Gouvernement.
Au volant de sa muscle-car douée de conscience et imprégnée des trois lois d'Asimov surnommée KITT (pour "Knight Intelligence Two Thousand"), Michael Knight traque alors les criminels pied au plancher.
Convaincu qu'une bonne presse passe par de bonnes audiences, Eric Dahlquist, président de l'agence de communication de Pontiac, vit la sollicitation de la production NBC comme une occasion en or pour mettre la toute nouvelle Trans Am sous les projecteurs. General Motors était habituellement friand de ce mode de promotion, et les succès passés au cinéma ou dans des séries comme L'Homme qui Tombe à Pic justifiaient largement ces investissements. Connaissant le palmarès de Glen A. Larson à qui l'on devait déjà Magnum, l'enthousiaste Dahlquist parvint à se voir fournir trois Trans Am 1982 et commença à travailler sur leur transformation en KITT. Pourtant, cette promesse de gloire commença dans le noir !
En effet, Jim Graham, responsable de la promotion chez Pontiac, excluait d'accoler la Firebird au projet Knight Rider. Il refusait de voir la Trans Am tournée en ridicule, travestie en voiture parlante à la manière de la fantasque série Une mère pas comme les autres. Eric Dahlquist trouva finalement du soutien auprès du fraîchement établi patron de Pontiac : Bill Hoglund lui-même.
Il suffit généralement d'un bandeau de diodes rouges pour que le public s’écrie "Oh, la K2000", au lieu de "Oh, une Trans Am 82". Et pour cause ! Assez peu de transformations lourdes furent nécessaires pour créer le design de KITT. Il s'agissait davantage de customisations bien placées qui changèrent une voiture noire déjà sauvage et racée en un clone de Batmobile au caractère fort, et étrangement humain.
À l'extérieur, la Trans Am n'eut besoin que de feux arrière sous Plexiglas teinté et d'une bande lumineuse au bout de son capot pour être changée en KITT. Contrairement à la croyance, l'idée de ces lumières censée animer les émotions de la K2000 n'était pas inspirée du HAL 9000 de 2001, l'Odyssée de l'espace, mais bien des Cylons de Galactica.
L'âme de KITT résidait surtout dans l'habitacle. Son designer Michael Scheffe intégra d'abord des ordinateurs CoCo TRS-80 par-dessus le tableau de bord d'origine, puis modernisa les technologies au fil des saisons. Une vraie vitrine high-tech avec, en VF, le timbre doux et taquin de Guy Chapellier pour l'exprimer !
Un détail après l'autre, la création d'une seule Trans Am "KITT" demandait environ six semaines de travail et 18 000$ de budget. La magnanime écurie Pontiac livrait ses voitures pour 1$ symbolique. Fort heureusement ! Car en quatre saisons, la K2000 connut autant de modifications que de tôle froissée.
Grâce à un heureux coup du sort, la production de K2000 put bénéficier de nombreuses Trans Am non vendables. À chaque début de saison, KITT était détruite puis améliorée. Et chaque saison, entre quatre et neuf voitures furent utilisées pour offrir un spectacle mémorable qui ne lésinait pas sur les cascades !
On estime à vingt-trois le nombre de Trans Am utilisées pour la série originale. À celles-ci s'ajouta une réplique vide tout articulée pour les gros plans où KITT activait son mode Super Vitesse et autres gadgets. De même, les pirouettes les plus périlleuses furent confiées à des miniatures créées sur mesure à partir de maquettes de Camaro. Pour voir grand et sauter par-dessus un hélicoptère, il faut voir petit ! Mais KITT se conduisait-elle quand même toute seule ? Que nenni ! L'un des exemplaires fut en réalité doté d'un second jeu de commandes placées sous la ligne de caisse, dissimulant ainsi le conducteur.
En dépit de nombreux spin-off plutôt honteux qui osèrent mettre KITT dans la peau d'une Mustang, la Trans Am K2000 originale devint culte et le resta au fil des décennies. Après l'arrêt de la série, Pontiac mit en vente des kits d'accessoires pour changer sa voiture en réplique de KITT. Finalement, à l'image d'autres voitures stars comme la DeLorean, la Firebird Trans Am 82 de K2000 perdura dans les esprits et sur les routes grâce aux fans les plus bricoleurs.
En contrepartie de cet engouement, il devint plus difficile de retrouver et authentifier les quelques cinq voitures originales de la série qui n'ont pas été détruites. Nombreux sont ceux qui se targuent d'avoir acquis une "vraie" K2000. De Michael Jackson au chanteur de NSYNC en passant notre animateur local Vincent Perrot, tous clament (parfois à tort) en posséder une. En définitive, le fait qu'il y ait eu plus de Trans Am "KITT" originales vendues que de voitures utilisées pour la production prouve que la K2000 était, et restera, une légende insaisissable.